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Cette thèse étudie la notion de culture de sûreté, nouveau « mantra » des organisations à haut risque (Silbey, 2009). Apparue à la fin des années 1980 afin de mieux prendre en compte l’organisation dans la gestion de la sécurité nucléaire, elle est aujourd'hui très utilisée dans les discours comme dans les politiques managériales des entreprises à haut risque. L’enquête ethnographique, menée par observations de situations de travail, d’entretiens et de l’analyse de documents, permet d’étudier la construction sociale de la notion de culture de sûreté, ses représentations, ses usages et son influence sur l’organisation du travail dans les centrales nucléaires. La thèse appréhende la culture de sûreté comme un objet hybride entre un discours qui serait diffusé dans les industries à risque et un outil de gestion de la sécurité. Elle analyse comment la notion de culture de sûreté s’est installée dans différents espaces sociaux de l’industrie nucléaire grâce à sa flexibilité interprétative : experts internationaux de la sécurité nucléaire, chercheurs des sciences de la sécurité industrielle, dirigeants de la division production nucléaire d’EDF et managers de proximité des centrales nucléaires. La comparaison des systèmes d’action de trois centrales nucléaires montre que dans un univers hautement normé et procéduralisé, la culture de sûreté est devenue un outil, de nature essentiellement discursive. Les managers s’en saisissent pour agir sur les contraintes qui pèsent sur eux et les rapports de pouvoir dans lesquels ils inscrivent leur action, de manière à rendre leur travail plus efficace. La thèse met ainsi en avant la capacité des discours à agir concrètement sur le travail.